Vers Levgrad !

Quotidiennement, l'état-major se réunissait dans la salle des cartes du site Zspied pour faire le point sur le conflit, et comme d'habitude c'est l'aide de camp du Premier Fehér qui présentait la situation militaire.

- Messieurs, Madame,

L'offensive Rakels s'est déroulé sans anicroche. Nos unités ont atteint la mer non sans faire de nombreux prisonniers. Autour de Mitau, les dernières poches de résistances ont été réduites. En Lazournaïa, des offensives locales ont été couronnées de succès.

Quant à l'ennemi, voici sa situation. Il n'a guère plus d'atouts dans sa poche. Il n'a plus d'aviation, et il commence à manquer de munitions. Ses troupes sont exsangues. Selon nos estimations, il n'a plus que vingt cinq mille hommes sous les drapeaux. Nous en avons quatre fois plus. Cinq mille de ses soldats sont pris dans la poche d'Argentorate, mais ils ne forment plus un front continu. Chaque groupe livre sa bataille sans coordination. Le moral de cette troupe est mitigée. Certaines unités se rendent au premier coup de fusil, d'autres se battent jusqu'à la mort dans une inconscience têtue.
C'est sur le front du Lazournaïa que l'ennemi a encore quelques capacités. Vingt mille soldats, qui en certaines circonstances peuvent mener des offensives et enfoncer nos lignes. Néanmoins, nous disposons d'une énorme supériorité en hommes et en matériel.

Kaljulaid reprit la parole.

- Fehérs, Fehérins, nous y sommes ! Nous avons éliminé le gros de l'ennemi à Mitau et l'offensive Rakels lui a brisé les reins. Nous pouvons marcher sur Levgrad et finir cette guerre. Dès demain, nous anéantirons les dernières positions de l'ennemi en Lazournaïa et nous marcherons sur Levgrad en longeant la côte est et la côte sud. Inutile de nous aventurer dans les montagnes, laissons-y geler nos ennemis, allons droit vers le centre névralgique de l'ennemi.

Puis se tournant vers ses officiers.

C'est vous Rakels qui mènerait l'offensive, et en qualité de Général !

Le général Rakels triomphait. Ses idées novatrices sur l'art de la guerre s'étaient révélés terriblement efficaces sur le terrain, il avait ouvert les portes de la victoire pour son pays, et pour tous le peuple, il était le prototype du parfait officier livadien, rusé, audacieux et offensif.

Et aujourd'hui, il mènerait son pays à la victoire finale !

L'assaut débuta au petit matin. Un lourd bombardement d'artillerie s'abattit sur les lignes ennemies, et derrières leurs engins blindés, soixante dix mille Livadiens sautèrent à la gorge de leurs adversaires sur trois couloirs au nord et un au sud balayé par des bombardements intenses. Le combat, déséquilibré, porte en lui quelque chose de fatal et d'inexorable pour les troupes républicaines prises au piège.

Au sud, le front se désagrège rapidement. L'appareil militaire républicain n'est plus capable de tenir une ligne de front. Il fortifie des points dont il ordonne l'évacuation trop tardivement. Aussi, l'avancée est rapide. Les forces mobiles contournent ces îlots qui sont investis par les fantassins et les commandos marines.

Au nord, le front est plus solide. Au nord-ouest, l'avance est coûteuse, mais rapidement, les Républicains doivent se replier devant la crainte d'un autre encerclement. La retraite est désordonnée et sous le feu de l'aviation légère et de la chasse.

Trente mille hommes attaquent le long de la côte. C'est l'axe principal de la poussée livadienne vers Levgrad. Aidé par l'artillerie de marine, les nationalistes bousculent, débordent et taillent en pièces une armée qui manque de tout.

A midi, Rakels eut vent des rapports d'observation aérienne. Les Républicains reculent partout et en désordre vers Levgrad pour un baroud d'honneur. La défaite semble désormais inévitable.

L'opération se poursuivait et les unités de pointe avançaient avec pour objectif de se rejoindre. Ainsi, Levgrad serait complètement encerclée.

Bien à l'ouest, on travaillait à réduire la poche d'Argentorate. Globalement, les Républicains savaient désormais que la guerre était perdue et ils se rendaient aux premiers blessés. Ils nourrissaient quelques regrets quand ils voyaient que l'on fusillait les officiers immédiatement. D'autres par contre, durs parmi les durs, prenaient le maquis. Tout semblait croire que lorsque la guerre, la grande, serait terminée, il faudrait mener la petite, la guerilla, contre les irréductibles planqués dans les vallées argenoises.

En Levland, l'étau se refermait. Le front républicain du centre repliait en désordre et la chasse livadienne faisait des cartons. Alors les rouges jetaient leurs fusils pour courir plus vite.

Les commandos livadiens et les Gardes Livadiennes sautaient en parachutes pour prendre les points et les villes les plus importants. Partout, ailleurs, les troupes nationalistes prenaient la route de Levgrad pour assiéger sa poche, dans ce qui serait la dernière bataille de la guerre.

Il était minuit passée, quand l'état-major eut vent de la jonction des forces nationalistes à l'ouest de Levgrad. Par ailleurs, on avait appris plutôt la réduction de la poche d'Argentorate. Ordre fut donné aux unités de se tenir en position défensives autour de la poche de Levgrad tandis que la sixième brigade ratissait les monts argenois pour détruire les derniers points de résistance.