Igor Payluchenko

Rentré chez lui auprès de son épouse après avoir reçu la médaille de Kalingrad, Payluchenko réalisait à quel point il revenait de loin.

Né en Valdisky dans une famille d'instituteurs, il avait reçu une éducation complètement merksiste. Néanmoins, ces parents se targuant volontiers d'être des esprits libres avaient dans leur bibliothèque quelques ouvrages polémiques, à la limite du fascisme aurait-dit le gros Gorilov. Une bible, des romans zollernois, des biographies de grands militaires et capitaines.

Igor s'était révélé être un adolescent brillant. Véritable armoire à glace, il était aussi un élève doué. Rêvant à une carrière militaire qui l'extrairait de l'existence morne et frugale merksiste, son excellent CV lui avait permis d'obtenir une bourse pour étudier à l'étranger. Après un an d'études au Krassland, il n'était plus merksiste mais écœuré par l'immoralité capitaliste. Après deux années de plus au Zollernberg, il était devenu zorthodoxe. Son cycle universitaire s'achevant, il partit pour Livadia et tomba amoureux du pays et d'une femme qu'il épousa.

Alors Igor sut qu'il était Livadien. Tout dans son âme, dans ses aspirations l'entrainait vers Livadia. Il en demanda la nationalité. L'administration, d'habitude si pointilleuse et si méfiante la lui donna très rapidement.

Il songea alors à s'engager dans les commandos marines, mais un instructeur lui suggéra plutôt de rejoindre les services secrets où sa parfaite connaissance serait utile, si néanmoins, il acceptait de servir contre son ancienne patrie.

Igor accepta immédiatement, par anti-merksisme, et après trois ans de formation et deux enfants, il embarqua pour être infiltré en Valdisky.

Payluchenko installa son réseau en Valdisky. Ce ne fut pas chose aisée. Même en proie à la flémingite, le contre espionnage merksiste était sur les dents, heureusement le Zollernberg servait de base arrière.

Après plusieurs moins d'infiltration, lui vint des nouvelles troublantes du pays. La racaille merksiste fomentait des troubles, au sein même de Livadia ! Quelle souillure ! Impuissant, fou d'inquiétude pour son épouse et ses enfants, Igor assista de loin au naufrage de Livadia. Et Dieux merci, les camarades sauvèrent tout. Kaljulaid prit le pouvoir et trucida la canaille rouge.

Rapidement, il reçut de nouvelles instructions. L'Internationale Merksiste, sous la conduite du sinistre Enculine voulait rassembler tout ce que le micromonde comptait de bandits pour les déverser en LIvadie. En s'infiltrant à l'IM, il fut, hélas, découverte, mais quel pied d'avoir pu dire tout son mépris aux sales rouges !

Alors Igor connut l'enfer sur terre. La prison centrale merksiste fut son long chemin de croix. Il fut torturé une première fois. Passage à tabac, waterboarding, Igor endura tout. Les merksistes voulaient qu'il trahisse les camarades de son réseau. Il ne parla pas.

La seconde séance de torture fut pire encore. Dans sa geôle, Igor crut mourir. Puisant au fond de lui-même, piochant dans ses ressources mentales et physiques, il ne parla pas et tomba dans le coma.

En sortant du coma Kaljulaid trouva ses geôliers de fort méchante humeur. En lisant entre les lignes, il comprit que les Nationalistes étaient sur le point de vaincre les merksistes et que l'expédition de l'IM s'était avéré être un échec cuisant.

L'un de ses bourreaux lui annonça franchement la couleur. Il ne verrait pas la victoire fasciste, il mourrait ici. Ce à quoi Payluchenko lui répondit qu'il avait la chance qu'il soit attaché.

Et puis Payluchenko comprit qu'il allait être échangé et revenir au pays. Comme Kaljulaid avait retenu la Livadie alors qu'elle sombrait, le grand homme l'attrapait par le collet dans le puit le plus sombre du micromonde.

La déconfiture de ses geôliers et du gros Enculine était absolument délicieuse. Néanmoins, il n'était pas encore tiré d'affaire jusqu'à ce qu'on le fourgua dans un avion. A son arrivée, on lui retira le sac de la tête et il sut qu'il était à Micropolia. Ses compatriotes de l'ambassade vinrent le chercher et il put s'y reposer, enfin libre !

Il eut des nouvelles de sa femme; il en pleura de joie. Peu après, son supérieur lui annonça qu'il allait recevoir des mains même du Premier Fehér, la médaille de Kalingrad ! La plus haute distinction militaire de Livadia, celle qui récompensait un acte de bravoure exceptionnel, celle qui avait été remise à une poignée d'élus !

Ce grand moment de joie passé, Payluchenko se retrouva chez lui, auprès des siens. On l'informa de son versement dans l'armée régulière où son expérience serait mise à profit.

Mais Payluchenko avait d'autres projets. Il entendait toujours servir sa patrie et combattre le merksisme.

Mais cette fois-ci, non pas avec le sabre, mais avec la plume !